Maîtrise des coûts

« La logistique urbaine, c’est complexe. Il nous a fallu deux ans et demi de travail pour parvenir à choisir les équipements, organiser les flux, etc. Deux mots peuvent symboliser ce que nous avons fait : passion et solution. Nous avons appliqué des méthodes industrielles à la logistique urbaine pour organiser les flux. Nous avons mis en place une solution globale pour des marchandises diverses, boissons pour les cafés, hôtels, restaurants, colis pour des prestataires de distribution, des déchets recyclables, des bouteilles consignées. C’est une solution écologique mais qui n’est pas plus chère qu’une autre », continue Thomas Castan.
La maîtrise des coûts est le résultat d’une organisation pointue des flux, des zones de livraison, des temps de trajets (mapping, grilles SMB…) mais aussi de l’existence de flux aller et retour pour le bateau et les vélos-cargo. Le groupage/dégroupage se fait sur le quai.
Pour la direction territoriale Strasbourg de VNF, la solution « démontre une nouvelle fois la pertinence du mode fluvial en milieu urbain, pour de la logistique de proximité, avec une livraison à faible émission de CO2, sans congestion et nuisances pour les riverains. C’est un nouveau service performant et décarboné de livraison en centre-ville par la voie d’eau associé à des vélos-cargo électriques qui assurent la livraison du dernier kilomètre. C’est une solution innovante pour répondre aux problématiques de congestion routière et de pollution que connaissent toutes les grandes villes. Cette démarche alternative au mode routier témoigne d’une vraie volonté de développer de nouveaux modes d’approvisionnement des territoires qui soient à la fois efficaces, propres et respectueux de l’environnement ».
La DT précise que la solution permettra « à terme de transporter 122 t de marchandises livrées (boissons, colis) et 48 t de logistique retour (produits de recyclages : papiers, cartons, consignes) en une seule rotation journalière ». Pour le moment, le bateau utilisé est une barge de VNF qui apporte également un soutien dans le cadre des plans d’aide au report modal (Parm) et à la modernisation et à l’innovation de la flotte (Pami).
Livraison juste à temps

En novembre, la solution s’est diversifiée avec du transport de pavés pour le chantier de transformation de la Manufacture des Tabacs. Un premier voyage a été réalisé le 12 novembre 2020. Le bateau chargé de 6 t de pavés a fait le trajet depuis le port où se trouve l’entrepôt d’ULS jusqu’au quai des Pêcheurs sur les rives de l’Ill, lieu où les livreurs avec les vélos-cargo prennent le relais pour la livraison au chantier situé à proximité. Les pavés sont répartis dans des grands sacs de chantier jusqu’à 180 kilos, le poids maximum possible pour les vélos-cargo à assistance électrique.
Cette opération est prévue pour durer 10 à 12 jours en 2020 et d’autres livraisons auront lieu en 2021 et 2022 pour un total de 700 t. La fin du chantier de transformation de la Manufacture des Tabacs de Strasbourg est prévue pour 2023.
« Notre solution permet une livraison en juste à temps au quotidien et répondant exactement aux besoins du chantier, explique Thomas Castan, président d’ULS. Par exemple, les 12 et 13 novembre, le besoin était de 6 t puis le 14 novembre de 3 t. Nous pouvons sans difficulté adapter la livraison à ces besoins variables. Cela évite au chantier de gérer un stockage sur place. Cela évite des circulations de poids lourds dans le centre-ville, de la pollution et des accidents éventuels. Notre solution globale de logistique urbaine réduit les risques et répond aux besoins du client ».
La fermeture des cafés, bars, restaurants à partir d’octobre 2020 a stoppé la livraison des boissons mais celle des colis et la reverse logistique avec les déchets se poursuivent et d’autres chargeurs ont fait part de leur intérêt pour la solution.
« Des tests sont en cours et nous allons transporter de nouvelles marchandises. Il va y avoir plus de fret, plus de volume », précise Thomas Castan, par exemple de la farine pour des boulangeries mais aussi des produits frais.
L’objectif d’ULS est de s’implanter dans d’autres villes, en commençant par celles situées à proximité de Strasbourg mais aussi ailleurs en France et dans d’autres pays européens. Les chargeurs qui optent pour la solution à Strasbourg ont d’autres implantations et peuvent jouer un rôle important pour le déploiement de la solution dans d’autres agglomérations.
Pour Thomas Castan : « C’est une vraie conduite du changement que nous avons réalisé et que nous poursuivons malgré l’année terrible que nous vivons. Le bateau fonctionne 6 jours sur 7. ULS emploie désormais 15 salariés. Nous continuons dans une démarche de conquête avec le même enthousiasme ».
Étendre la réflexion
« Depuis 2017, nous avons un partenariat avec la ville de Strasbourg avec l’objectif de travailler sur tous les usages de l’eau. C’est dans ce cadre que nous avons travaillé pour fluvialiser des chantiers dans la ville. Nous avons identifié le potentiel du quai des Pêcheurs dont la situation est assez centrale par rapport à l’hypercentre de Strasbourg et proche de plusieurs chantiers prévus », rappelle Jean-Laurent Kistler, chef du service développement de la voie d’eau à la direction territoriale Strasbourg de VNF. Le partenariat prévoit que la ville intègre systématiquement une clause fluviale dans chaque appel d’offres. Une ZFE s’applique à Strasbourg depuis le 1er septembre 2018. Une première expérimentation de logistique urbaine fluviale a été réalisée en 2018 au quai des Pêcheurs avec du transport de pavés sur palette pour un chantier dans la ville puis est venu ensuite l’appel à projets en 2019 qui a mené à choisir ULS. « Cela fonctionne de façon satisfaisante, c’est une logistique complète avec des flux aller-retour. L’étape suivante est de réfléchir à d’autres quais disponibles ailleurs dans la ville, par exemple dans la partie Nord. Il est envisagé d’étendre la réflexion à l’échelle de la métropole. Il y a une volonté et une demande autour de solution de logistique urbaine fluviale appuyée par les évolutions réglementaires et par le démonstrateur ULS », ajoute Jean-Laurent Kistler.